L'EMIGRATION
FRANCAISE VERS LA LOUISIANE DE 1698 à 1754
Marie
Claude Guibert, Gabriel Debien et Claude Martin ont étudié
cette emigration d'après les notariales des ports atlantiques.
Le contenu ci-après est emprunté à leur étude
"Notes d'histoire coloniale n° 178" publiée comme
"Actes du 97e congrès des sociétés savantes".
Nantes 1972, et conservée aux Archives Départementales de
Loire-Atlantique. Ils distinguent trois phases :
4
- Les concessions (1719-1720)
4
- Pour la concession Sainte-Candide.
Louis de Brancas-Céreste,
marquis de Brancas, gouverneur de Provence et sa femme Elisabeth-Charlotte-Candide,
le frère cadet du marquis, Louis-Alphonse de Brancas, duc de Villars,
sa femme, Marie-Angélique Frémin, Renaud Constance de Pons,
maître de camp des gendarmes du roi et Charlotte de Gadagne d'Hasrun,
Louis de Clermont, marquis de Chaste, Louis Bonfils, premier commis et
trésorier des haras du royaume, procureur général
et spécial du marquis de Brancas, s'étaient associés
en 1719 pour obtenir de la Cmpagnie des Indes qui succèdait à
la Compagnie d'Occident une concession en Louisiane. L'habitation fut
appelée Sainte-Candide en l'honneur de la marquise de Brancas,
qui avait dû mettre de grands capitaux dans l'affaire.
La concession fut obtenue en novembre 1719 et les premiers engagements
qu'elle fit sont à la fin décembre. Ils sont conclus à
La Rochelle :
'A monsieur Théodore Denis, écuyer, sieur de Vitré,
demeurant ordinairement à Québec, de présent dans
cette ville logé chez la dame Lesaur, paroissse Saint-Jean, comme
fondé de procuration des seigneurs et dames concessionnaires de
l'habitation Sainte-Candide, située en la colonie de la Louisiane,
passée par Maïtre Ledoux, notaire à Paris le 29 novembre
1719, s'engageant en qualité de défricheurs de terre pour
travailler à tout ce qui sera du bien et à l'avantage de
ladite concession... 3 ans...., nourris de pain, viande et autres denrées
du pays, tant sains que malades, gages toujours courants et aussi traités
et gouvernés aux dépens du sieur de Vitré sans aucune
diminution de leurs gages."
A l'expiration de leur temps, leur est promis un congé absolu pour
passer en France, "si bon leur semble", aux frais des concessionnaires
"si mieux n'aiment s'établir" sur la concession, où
il leur sera donné en récompense des services qu'ils auront
rendus une partie des terres qu'ils auront défrichées, "se
réservant néanmoins sur ladite partie de terre, les droits
seigneurieux et autres droits" dont elle sera chargée. (c'est
la première fois que dans un engagement pour la Louisiane, il soit
question de droits seigneuriaux).
28 décembre 1719 :
- Jean Viot, de St-Rémy-de-Bordeaux, 28 ans, charron, non marié.
210 l. par an, en espèces du cours ou marchandises.
- J. Pierre Dumas, de St-Seurin-de-Bordeaux, 26 ans, non marié.
200 l.
- Antoine Siblet, de St-Rémy-de-Bordeaux. 16 ans. 100 l.
- François d'Hollande, de la paroisse H. D. de St-Quentin, en Picardie,
36 ans, non marié. 200 l. Signe.
2 janvier 1720 :
- Jean Alliaud, de la paroisse Monysin, de Briançon, en Dauphiné,
23 ans, non marié. 150 l. par an.
3 janvier 1720 :
- J. B. Richard de Vitry près Arras, pas-de-Calais, 26 ans, non
marié. 150 l. par an.
6 janvier 1720 :
- Armel Lemarchand, de Locmaria de Quiberon (Locmariaquer), Morbihan,
30 ans, non marié. 150 l par an.
9 janvier 1720 :
- René Fleury, de Pons en Saintonge, paroisse St-Martin, Charente-Maritime,
30 ans, non marié. 180 l. par an.
- Jean Barisseau, de St-Maurice près Confolens, Charente, 28 ans,
non marié. 150 l.
12 janvier 1720 :
- René Roux, d'Aunois près Dampierre sur Boutonne, mais
demeurant à La Rochelle, Charente-Maritime, 20 ans, recruté
comme défricheur et laboureur. 120 l. par an.
- Jacques Bridin, de Montils près Saintes, Charente-Maritime, 18
ans, comme défricheur et laboureur. 100 l. par an.
- Pierre Maurice, d'Amcon évéché de Vannes, Morbihan,
35 ans, comme maçon et défricheur. 150 . par an. Signe.
15 janvier 1720 :
- Jean Duguet, de la paroisse de Fouras Eloi, près de La Rochelle
(Charente-Maritime), 37 ans, comme scieur de long et défricheur.
140 l. par an.
18 janvier 1720 :
- Pierre Pain, de Rochefort, 25 ans, tonnelier et fendeur de merrain,
engagé en cette qualité. 300 l. par an. Signe.
- Nicolas Biberet, de Rochefort, 40 ans, charpentier de gros oeuvre et
calfat, engagé en cette qualité. 360 l.
- Pierre Laforest, d'Auxonne en Champagne, Côtes d'Or, laboureur
et défricheur. 120 l. Signe.
19 janvier 1720 :
- Jean Marie, de la paroisse Saint-Julien en la juridiction de Roquequart
en Quercy, Tarn-et-Garonne. 60 l. par an.
Les caractères
généraux de ce recrutement rochelais c'est la différence
entre les garçons de service, laboureurs, défricheurs en
pleine force à 170, à 150 l. par an, et les ouvriers des
métiers recherchés : charrons, tonneliers, charpentiers,
à 200, 300 et même 360 livres. Les plus jeunes, de 16 et
17 ans, n'ont que 100 ou 60 livres. Il y a un échelonnement suivi.
on a recruté aussi des gens non mariés. C'est la première
fois que l'on a fait ce choix.
Celui qui, engagé (par devant Poirier, notaire à Nantes)
pour la concession de Sainte-Candide, à Nantes Jean S..., sieur
du Tordoas, garde magasin de l'habitation de Nantes, interprète
différemment le instructions qu'il a reçu des concessionnaires.
C'est bien pour trois années qu'il sont pris, entretenus et payés
en nature ou en argent à leur volonté ; passé trois
ans, ils pourront rentrer en France ou rester sur les terres défrichées,
mais en payant eux aussi les droits seigneuriaux.
29 janvier 1720 :
- Pierre Soutto, de la paroisse St-Paterne de Vannes, 36 ans, cordonnier,
fils de feu Jean. 100 l. Signe.
- François Moreau, de Baurnais évéché de Saintes,
Charente-Maritime, 25 ans, sellier et bourrelier, fils d'Abel. 165 l.
6 février 1720 :
- J. B. Hipeau, de la Flèche, paroisse St-Thomas, Sarthe, 17 ans,
boulanger, fils de Jacquette, travaillera de son métier. 150 l.
Signe.
- Vincent Mainevayet, de Blain, Loire-Altantique, jardinier et défricheur
de terres. 150 l.
- Guillaume Bailly, de Blois, 20 ans, serrurier, fils de Laurent. 200
l.
- Jean Dampon, de la Chapelle Moche, Orne, 28 ans, maçon, fils
de feu Jean. 300 l. Signe.
- Jacques Nouleau, de Darton évéché de Nantes, Loire-Atlantique,
30 ans, laboureur défricheur, fils de Jacques. 100 l.
- Fabien Bidault, de Coulaisnes, évéché du Mans,
Sarthe, 34 ans, maçon, fils de Charles. 300 l. Signe.
- Joseph Bottereau, de la Trinité d'Angers, Maine-et-Loire, 20
ans, maçon, fils d'Ambroise. 300 l.
- Charles Boret, de Paris paroisse St-Etienne du Mont, 19 ans, maçon,
fils de Claude, 160 l. Signe.
- Paul Sottineaux, de Blois paroisse Saint-Honoré, Loir-et-Cher,
19 ans, tailleur d'habits, fils de Nicolas. 200 l.
- Paul Neaud, de St-Philbert de Noirmoutiers, Vendée, 28 ans, charpentier,
fils de feu Etienne. 200 l.
17 février :
- Illisible, de Tretou (sans doute Trentemout ?), évéché
de Nantes, Loire-Atlantique, 25 ans, fils de feu Joseph. 90 l.
19 favrier 1720 :
André Salleton, du bourg d'Avorton, évéché
du Mans, Mayenne, 24 ans, taillandier, fils de feu Jean. 200 l.
24 février 1720 :
- René Robert, de St Pierre de Saumur, Maine-et-Loire, 18 ans,
défricheur, fils de Jacques. 50 l.
- Julien Chevalier, de St-Plumalain, évêché de Vannes,
32 ans, scieur de long, fils de feu Olivier. 100 l.
26 février :
- Guillaume David, de Muzillac, évéché de Nantes,
Morbihan, 18 ans, meunier, boulanger et charpentier de moulins, fils de
feu Guillaume. 50 l.
- Julien Verger, de Saint-Rialle, évéché de Nantes,
25 ans, meunier, fils de feu Julien. 60 l.
5 mars 1720 :
- Thomas Dutreuil, de St-Remy de Saumur, Maine-et-Loire, 29 ans, taillandier,
fils de feu Thomas. 200 l.
S'il n'a pas cherché à rassembler des célibataires,
l'agent de Nantes s'est attaché aux hommes dont le père
est mort, a moins que ce soit là qu'un pur hasard et que le nombre
de jeunes hommes ayant perdu leur père ne soit alors très
grand.
La même impression est confirmée par la levée de Jacques
Debellisle, ancien officier des Dragons et directeur le l'habitation de
Sainte-Blandine faite à Nantes dans les mêmes conditions.
(Poirier, notaire).
14 mars 1720 :
- Donneau, de St Jean Conneval, évéché de Boischampagne,
25 ans, fils de feu Jean qui travaillera à son métier pendant
3 ans qui seront comptés à partir de ce jour. 120 l. par
an.
- Pierre Canne, de Servant, évêché d'Orléans,
25 ans, défricheur, fils de feu Claude. Mêmes conditions.
6 avril 1720 :
- Pierre Jogeard, de Labetz, près Crespion, évéché
de Meaux, 20 ans, second chirurgien, fils de feu Jacques, Maître
chirurgien. 250 l. Signe.
11 avril 1720 :
- Guillaume Chereul, de St-Lo en Normandie, Manche, 31 ans, en qualité
de commandeur pour l'agriculture des terres, pour 3 ans qui commenceront
à l'arrivée. 400 l. A partir de ce jour et jusqu'au départ,
20 sols par jour. Signe.
La grande différence avec le recrutement pour les îles, c'est
que l'on a mieux choisi que ceux qui partaient pour Saint-Domingue ou
la Martinique. Plus de ces demi-enfants de 13 ou 14 ans. Plus de ces salaires
d'extrême misère.
|