ILE SAINTE-CROIX - Le pénible hiver
1604-1605
Champlain occupe
le mois de septembre à explorer la côte atlantique jusqu'à
l'embouchure de la rivière Pentagouët. Il ne trouve pas que
le pays de Norembègue soit un nouvel Eldorado, car il n'a découvert
aucune des merveilles que quelques-uns ont décrites. «Je
crois, affirme-t-il, que ce lieu est aussi désagréable en
hiver que celui de notre habitation, ce dont nous sommes bien déçus.»
Et l'hiver qui commence sera terrible ! Dès le 6 octobre 1604,
la neige couvre le sol. Au début de décembre,
« nous vîmes passer des glaces qui venaient de quelque rivière
qui était gelée ». Le froid devient excessif et le
sol se couvre de trois à quatre pieds de neige. Le scorbut fait
alors son apparition. Personne ne lui connaît de remède efficace.
« De 79 que nous étions, il en mourut 35 et plus de 20 qui
en furent bien près. » La recette de la concoction de l'annedda,
dévoilée jadis par les Indiens à Cartier, semble
s'être évanouie au cours des ans. Les chirurgiens pratiquent
des autopsies dans l'espoir de trouver la cause de la maladie.
Presque tout l'hiver, les colons doivent se contenter, pour nourriture,
de chair
salée et de légumes. Le froid est tel que, hors le vin d'Espagne,
toutes les autres boissons gèlent. "on donnait le cidre à
la livre" puis "nous étions contraints d'user de très
mauvaises eaux et boire de la neige fondue, car nous n'avions ni fontaine,
ni ruisseaux".
Heureusement,
au mois de mars 1605, des Amérindiens viennent sur l'île Sainte-Croix
échanger le produit de leur chasse contre du pain et de menus objets.
De Monts, un moment, songe même à rapatrier tout son monde en France.
« Mais Dieu nous assista mieux que nous n'espérions, car, le 15 juin suivant,
sur les onze heures du soir, Gravé Du Pont, le capitaine de l'un des vaisseaux
du sieur de Monts, arriva dans une chaloupe. Il nous dit que son navire
était ancré à six lieues de notre habitation. Il fut le bienvenu au contentement
de chacun. »
Dès le 17 juin,
de Monts décide de chercher un endroit plus propice pour s'établir. Pendant
plus d'un mois, il longe la côte vers le sud et descend jusqu'à
la hauteur de Cape Cod. Les Français prennent contact avec les Amérindiens,
remarquent leur façon de vivre et de cultiver la terre. À la fin du mois
d'août 1605, tout le monde déménage à Port-Royal. Les ouvriers transportent
la charpente des maisons construites à Sainte-Croix au nouvel emplacement.
Rapidement s'élèvent de nouveaux bâtiments, beaucoup plus considérables
que ceux de l'établissement précédent.
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